6 PISTES POUR PRENDRE SOIN DE SA FLORE INTESTINALE

6 PISTES POUR PRENDRE SOIN DE SA FLORE INTESTINALE

Notre alimentation et certains de nos comportements peuvent jouer en faveur de notre flore intestinale. Voici six façons relativement simples de l’équilibrer pour être en meilleure santé.

La flore intestinale n’a pas qu’une fonction digestive. Cet ensemble de bactéries, appelé microbiote, joue un rôle fondamental dans l’immunité et la régulation du poids et communique en permanence avec notre cerveau.

« La nutrition est un levier sur lequel on peut jouer pour favoriser la diversité bactérienne et être ainsi mieux protégé contre les maladies où son appauvrissement est impliqué comme le diabète, l’obésité, les MICI (maladies inflammatoires chroniques de l’intestin), les allergies ou le syndrome métabolique », indique Joël Doré, directeur de recherche à l’Unité d’écologie et de physiologie du système digestif (Inra).

L’activité physique semble aussi lui être favorable, au contraire des traitements antibiotiques répétés.

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Miser sur les fibres

« L’alimentation moderne s’est chargée en sucres, en graisses et en protéines alors que ce sont les fibres alimentaires qui sont particulièrement appropriées aux bactéries intestinales », poursuit Joël Doré. Il faudrait donc mettre dans son assiette plus de fibres. Toutes les fibres sont utiles : les solubles, appelées prébiotiques (capables de se dissoudre dans l’eau pour former un gel visqueux) comme les insolubles.

« Les bactéries intestinales s’en nourrissent, les dégradent, les fermentent, générant alors de nouveaux composés essentiels au bon fonctionnement de l’organisme. En clair, c’est la diversité des fibres qui fait la diversité du microbiote », explique le chercheur.

Où les trouver ? Tous les fruits et les légumes en contiennent ainsi que les légumineuses (lentilles, pois cassés, haricots secs…), les céréales complètes (c’est dans l’enveloppe du grain que se trouvent principalement les fibres), les fruits à coque (amandes, noix, noisettes, noix de coco) et les fruits secs.

Combien faudrait-il en consommer ? « À chaque repas, insiste Joël Doré. Et pour être sûr de diversifier la nature des fibres, il suffit qu’au moins trois genres différents de produits végétaux y figurent. » Et si on les digère mal ? Les fibres ont tendance à provoquer des ballonnements. Mieux vaut consommer fruits et légumes plutôt cuits, la cuisson adoucissant les fibres insolubles et les rendant plus digestes. Modérer aussi les aliments très fermentescibles (chicorée, oignon, ail, poireau, ail, asperge, artichaut, topinambour, salsifis, endive, pomme, légumineuses, chou, pastèque, concombre, kiwi, raisin, figue).

Si on souffre du syndrome de l’intestin irritable, il est préférable de limiter la consommation de fibres insolubles : produits céréaliers complets, fruits et légumes à peau comestible (figues, tomates, courgette, poivron, radis…), salade, céleri, chou-fleur, légumineuses, fruits secs… Pas de restriction en revanche pour les fibres solubles, douces pour l’intestin : avoine, seigle, orge, pomme, poire, coing, baies, raisin, orange, pêche, pamplemousse, chicorée, oignon, ail, poireau, ail, asperge, artichaut, topinambour, salsifis, endive.

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Ne pas négliger les probiotiques

« Certains probiotiques ont un effet plutôt anti-inflammatoire, certes modeste, mais intéressant pour le microbiote », atteste Joël Doré. Où les trouver ? Dans les yaourts et les laits fermentés vendus au rayon des laits frais (lait ribot, Yorik, Elben…). Mais aussi dans les fromages fermentés non pasteurisés à pâte dure (gruyère, cantal…), persillés (bleus, fourme, roquefort) ou encore à pâte molle (munster, livarot, camembert…) sachant que, pour ces derniers, les bactéries ne sont présentes que dans la croûte. D’autres aliments comme la choucroute crue, le pain au levain, certains produits dérivés du soja (miso, tempeh) ainsi que les olives en contiennent.

Sous forme de complément alimentaire. Aucun n’a pour l’instant démontré d’efficacité pour prévenir l’obésité. En revanche, plusieurs études ont montré que certaines souches avaient un effet bénéfique sur les symptômes de l’intestin irritable (douleur abdominale, inconfort), mais pas chez tout le monde ni avec les mêmes résultats.

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Limiter la viande rouge

La viande rouge augmente le risque de cancer du côlon, probablement en raison d’une oxydation des lipides par le fer. Or, des chercheurs français (laboratoire de recherche en toxicologie alimentaire ToxAlim, Inra) ont récemment découvert que le microbiote facilitait cette oxydation !

Ce que nous apprend une autre étude, américaine cette fois (publiée en 2012), c’est qu’un régime alimentaire riche en carnitine, un acide aminé présent en grande quantité dans la viande rouge – mais aussi dans certaines boissons énergisantes et compléments alimentaires visant à mincir ou à améliorer les performances physiques – favorise la prolifération de certaines bactéries impliquées dans une réaction chimique néfaste pour le système cardiovasculaire.

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Modérer les produits sucrés

« En comparant le microbiote de personnes en surpoids selon leur profil alimentaire, nous avons constaté que celles qui consomment beaucoup de sucreries et de boissons sucrées ont une flore appauvrie et présentent une inflammation importante au niveau du tissu adipeux, souligne le Pr Karine Clément, médecin directrice de l’Institut de cardiométabolisme et nutrition. Chez celles dont l’alimentation est riche en fruits, mais aussi en yaourts et en soupes, c’est exactement l’inverse. »

Des chercheurs américains ont de leur côté montré qu’un régime riche en sucre provoquait, en tout cas chez la souris, une altération du microbiote et des performances cognitives (adaptation à un nouvel environnement, mémoire…).

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Pratiquer une activité physique

Il ne s’agit que d’une étude (Université de Cork, 2014), qui portait de surcroît sur des joueurs de rugby professionnels, mais elle montrait quand même que tous ces athlètes avaient un microbiote particulièrement diversifié ! Plusieurs travaux évaluant l’impact de l’activité physique sur la flore sont en cours, mais compte tenu de tous les avantages qu’on lui connaît déjà, on peut sans attendre suivre les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé : pratiquer une activité d’endurance (marche, vélo, natation…) au minimum 150 minutes par semaine si elle est d’intensité modérée et au minimum 75 minutes si elle est soutenue.

Point important : l’activité doit toujours être pratiquée par périodes d’au moins 10 minutes. L’idéal est de compléter par des exercices de renforcement des grands groupes musculaires (cuisses, abdos, bras, pectoraux, dos…) au moins deux fois par semaine.

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NE PRENDRE DES ANTIBIOTIQUES QUE SI ILS NE SONT VRAIMENT NÉCESSAIRES

En détruisant les mauvaises bactéries mais aussi les bonnes, ces médicaments perturbent en effet l’équilibre des espèces qui composent le microbiote. Certes, celui-ci tend à revenir à son état initial en un à deux mois après la fin du traitement. Sauf que de nombreuses études montrent que des traitements répétés finissent par affaiblir durablement la flore. Et qu’en outre, ces mêmes traitements peuvent parallèlement entraîner un phénomène de résistance des microbes pathogènes au détriment des “bonnes” bactéries.

L’idée n’est donc pas de renoncer aux antibiotiques, mais de ne les utiliser que s’ils sont vraiment indispensables, en y associant, s’ils ont tendance à provoquer une diarrhée, la levure probiotique Saccharomyces boulardii, dont l’efficacité a été démontrée dans cette indication (par exemple Ultra-Levure, à raison de 200 mg/jour dès le début du traitement et en poursuivant cinq à six jours après la fin).

Auteur: Emmanuelle Blanc
Consultant(s): Karine Clément, médecin directrice de l’Institut de cardiométabolisme et nutrition (Ican)/Inserm/UPMC, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris.
Joël Doré, directeur de recherche à l’Unité d’écologie et de physiologie du système digestif (Inra), directeur scientifique de MetaGenoPolis
Laurent Naudon, chargé de recherche CNRS à l’Institut Micalis (Microbiologie de l’alimentation au service de la santé), Inra